Grandiose est le mot qui nous vient à l’esprit lorsqu’on s’approche de l’édifice situé place de la Maison Dieu à Limoges. Sacrée plus belle gare de France par le journal Le Monde, elle est construite en 1929 d’après les plans imaginés par Ronger Gonthier. Son caractère exceptionnel fait l’objet d’une inscription aux monuments historiques depuis 1975. Aujourd’hui, on t’emmène découvrir la gare des Bénédictins de Limoges.
Avant la gare, c’était comment ?
Ce lieu fut d’abord une léproserie, celle de la Maison Dieu qui donnera son nom à la place. Le Monastère des Bénédictins, dont l’édifice actuel tire son nom, se situait juste à coté de celle-ci. Une première gare se construit à la demande de nombreux élus et industriels comme le porcelainier Havilland qui implantera son usine à Limoges. En 1848, la municipalité rachète les parcelles à pas moins de 44 propriétaires. Les travaux débutent avec notamment la démolition du temple protestant de Limoges et le remblaiement des zones marécageuses.
Les premiers voyageurs
C’est le 16 juin 1856 que les premiers voyageurs posent leurs valises sur les quais de la gare faite alors d’un amas de planches. En 1848, la première gare en dure est inaugurée avec comme architecte Pierre-Louis Renaud qui fut aussi celui de la gare de Paris-Austerlitz. C’est à la suite de l’inauguration du tunnel de 1022 mètres et donc de la prolongation de la voie jusqu’à Périgueux, que la gare perd son statut de terminus. Un plan de 1873 la nomme : « gare d’Orléans ». L’ouverture de nombreuses lignes ainsi que l’expansion économique et démographique de la cité porcelainière la rendent rapidement incommode. C’est en 1908, à la demande du gouvernement, que la compagnie du Paris Orléans commence à réfléchir à un nouvel édifice.
Comment est arrivée la nouvelle gare ?
C’est après dix ans d’hésitation et l’émergence de nombreux projets que les élus retiennent celui d’une gare en surélévation. Les travaux débutent en 1924, après le déplacement de la plupart des services vers la gare des Charentes. La société des grands travaux de Marseille et l’entreprise Dufour construction sont les principaux acteurs de la construction. Il faudra un an pour créer les 34 puits nécessités par le caractère marécageux de la zone et la profondeur à laquelle se trouve un sol stable.
Des entreprises locales ont réalisé la charpente et la couverture. La charpente allie acier et bois tandis que la couverture est faite de plaque de cuivre. C’est au total, 200 ouvriers principalement italiens, qui assemblent les 10 000 m 3 de béton, 1 800 tonnes d’acier et 2 800 m3 de pierres. Le 8 avril 1929, c’est la démolition de la première gare, 71 ans après son ouverture. La seconde est inaugurée en juillet de la même année. L’architecture du bâtiment s’inscrit dans un style Art déco.
Un style Art déco
De grandes verrières ornent les façades. Celle de la place de la Maison Dieu, a des sculptures représentants, à gauche, Cérès, déesse de l’agriculture et à droite, Mercure, dieu du commerce et des voyageurs. Un grand dôme de 33 mètres de diamètre surmonte l’édifice. À l’intérieur, le verrier limougeaud Francis Chigot a créé les vitraux aux allures de feuilles de chênes, de châtaignes et de glands. Le hall se trouve 26 mètres sous la coupole. Aux quatre coins de celui-ci se tiennent des sculptures représentant le Limousin, la Bretagne, la Gascogne et la Touraine. La compagnie du Paris-Orléans desservait ces provinces.
Jusqu’en 1978, un mobilier en bois massif, dont une partie sera préservée à Saint Léonard de Noblat, occupait l’espace. Enfin, on ne peut pas rater le campanile haut de 67 mètres abritant une horloge de quatre cadrans de quatre mètres de diamètre. Et pour l’anecdote, les pendules affichaient 2 minutes d’avance afin de presser les voyageurs pour leur éviter de rater le train. La gare sera rénovée du campanile au grand hall durant les années 70.
Un édifice menacé plusieurs fois :
Menacée durant la seconde guerre mondiale d’abord : les Italiens bombardent le quartier, mais ne la touche pas. Les Allemands l’occupent pendant deux ans. Les bombardements détruisent entièrement la gare de triage voisine, mais conservent celle des Bénédictins. En revanche en 1951, un premier incendie volontaire ravage une partie de la toiture. Puis c’est le 5 février 1998 qu’un drame se produit sous les yeux des voyageurs. Un nouvel incendie se déclenche lors de travaux d’entretien. Les pompiers ont arraché des plaques de cuivre de la couverture du dôme en raison de leur localisation. Celle-ci se trouvait entre le dôme et le plafond. Les dégâts sont importants et engendrent une facture de 25 millions de francs pour reconstruire le dôme à l’identique.
Une gare célèbre !
Souvent représentée sur les cartes postales de Limoges, elle est également apparue, aux côtés d’une porcelaine, sur un timbre touristique. En 2009, le court métrage Un train de nuit met en scène la gare. C’est une annonce publicitaire pour le parfum Chanel N°5 où Audrey Tautou, célèbre actrice française, incarnait Coco Chanel. Anne-Laure Coulibaly et Thierry Chenavaud ont utilisé le campanile comme support dans un spectacle son et lumière en octobre 2020 dans le but de remercier celles et ceux qui ont pris des risques durant la crise sanitaire.
La gare des Bénédictins est donc l’un des plus beaux monuments du Limousin. Elle se trouve à côté du Champ de Juillet, parc réaménagé par le même architecte : Roger Gonthier en 1925. Et pour ceux qui n’auraient pas assouvis leur curiosité après la lecture de cet article, l’office de tourisme organise des visites guidées.